L’enquête après-sinistre: La collaboration de l’assuré n’est pas une option

  • Développement en droit 8 avril 2020 8 avril 2020
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Le devoir de collaboration d'un assuré dans une enquête après-sinistre inclut l’obligation de fournir de l'information juste du premier coup.

L’enquête après-sinistre: La collaboration de l’assuré n’est pas une option

L'enquête de l'assureur après sinistre est une composante essentielle du processus d'indemnisation. Évidemment, selon les circonstances, celle-ci peut s'avérer complexe et donner lieu à des conflits entre assureur et assuré sur la portée des obligations de chacun.

Dans l'arrêt Anderson c. Intact, compagnie d'assurances, la Cour d'appel du Québec a justement été appelée à se pencher sur l'appel d'un assuré, dont le recours à l'encontre de son assureur pour forcer le paiement d'une indemnité d'assurance avait été rejeté étant donné son manque de collaboration dans l'enquête de l'assureur.

Un bref rappel des faits s'impose. L'immeuble de l'assuré avait été endommagé par un incendie. L'assureur, après enquête, a pris la position que la police d'assurance était nulle dès le départ — ab initio — puisque l'assuré avait fait défaut de mentionner son véritable intérêt assurable dans l'immeuble.

En première instance, la Cour supérieure a conclu qu'en raison de « ses réticences et ses nombreuses déclarations contradictoires ou fausses, [l'assuré] a délibérément entretenu le flou, durant l'enquête après sinistres, sur les circonstances dans lesquelles l'immeuble a été acquis ». Le juge du procès a conclu que ce comportement avait porté préjudice à l'assureur, ce qui entraîne la déchéance du droit à l'indemnité. De par ce fait, la Cour supérieure a décidé de ne pas procéder avec la déclaration de nullité ab initio de la police. Par contre, elle a aussi ordonné à l'assuré de rembourser son assureur pour l'indemnité versée à son créancier hypothécaire dans les droits duquel il était subrogé.

En appel, l'assuré disputait la déchéance de son droit à l'indemnité et l'assureur l'absence de déclaration de nullité ab initio de la police d'assurance.

Dans un premier temps, la Cour d'appel rappelle les principes de l'arrêt Mécatech déterminant les modalités de l'obligation de l'assuré de collaborer à l'enquête d'un assureur: s'il est établi que l'assuré est de mauvaise foi dans sa collaboration et que l'assureur en subit un préjudice en ce qu'il ne peut effectuer son travail d'évaluation. L'arrêt Mécatech[1] avait déjà permis d'établir qu'un assuré avait une obligation positive de collaborer, notamment en se soumettant à un interrogatoire statutaire ou en produisant une déclaration assermentée. La Cour d'appel dans Anderson ajoute que la « réticence », le « flou » et les « déclaration contradictoires ou fausses », lorsqu'elles sont effectuées d'une manière délibérée, sont de nature à constituer de la mauvaise foi dans la collaboration de l'assuré.

Dans un second temps, la Cour d'appel rejette l'appel incident de l'assureur de déclarer la police nulle ab initio, se fondant sur le principe de déférence envers les conclusions factuelles du juge de première instance.

L'arrêt Anderson apparaît être l'effort le plus récent de la Cour d'appel pour étendre le devoir d'assistance d'un assuré suite à un sinistre. Bien que les deux arrêts concernent une enquête sur l'intérêt assurable d'un bien assuré, rappelons que l'obligation de collaboration de l'assurée prévue à l'article 2471 du Code civil du Québec est bien plus large. Elle englobe « les circonstances entourant le sinistre, y compris sa cause probable, la nature et l’étendue des dommages, l’emplacement du bien, les droits des tiers et les assurances concurrentes ». Il reste donc à voir comment les tribunaux évalueront l'obligation de bonne foi et le préjudice subi par l'assureur dans un contexte autre que celui de l'intérêt assurable.[2]

 


[1] Intact Assurances inc. c. 9221-2133 Québec inc. (Centre Mécatech), 2015 QCCA 916

[2] À titre de rappel, l'article 2484 CcQ prévoit que « L’assurance d’un bien dans lequel l’assuré n’a aucun intérêt d’assurance est nulle. » Le préjudice d'une enquête incomplète est donc bien circonscrit.

Fin

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